CHAPITRE IV

Occupation de Borleias, quatrième et cinquième jours

Pour la première fois depuis des années, Luke se dressait face à un adversaire de nature à entamer son courage et sa détermination.

La bureaucratie.

Les réunions étaient la pire arme de l’ennemi. Luke passait une, deux, voire trois heures à parler des tactiques de combat contre les chasseurs yuuzhan vong avec le colonel Celchu et un groupe de conseillers militaires. Puis il enchaînait par une réunion scientifique plus longue encore, où les participants tentaient, pendant des heures, d’expliquer pourquoi les Yuuzhan Vong et leurs créatures étaient invisibles dans la Force.

Luke apprit à combattre sa frustration en décidant de considérer ces manifestations comme des « activités pédagogiques »… Au même titre que les exercices, les inventaires et les entraînements obligatoires des novices Jedi à bord d’Aventurier Errant.

Mais les choses avançaient. Les membres du « Cercle Intérieur » développaient un réseau capable de se dissimuler à l’arrivée des Yuuzhan Vong pour mieux les combattre au moment opportun.

La résistance, similaire au réseau Jedi créé par Leia et Luke, rassemblerait de nombreux agents. Sur chaque planète ou presque, le Cercle Intérieur prendrait un ou deux contacts, qui eux-mêmes organiseraient des cellules, qui en créeraient d’autres. A l’extérieur de cette entité, nul ne connaîtrait des identités de plus de deux membres du réseau, afin de limiter les dégâts au cas où les Vong tortureraient leurs prisonniers.

Chaque cellule aurait pour mission d’établir une base cachée, un lieu de stockage de véhicules, d’armes, de droïds, d’outils – tout ce dont la résistance aurait besoin quand viendrait le temps de rendre les coups.

Les proches de Wedge connaissaient l’existence du Cercle Intérieur : on leur avait donné, en plaisantant, le surnom « d’initiés ». Mais tout le monde pensait que Wedge s’était seulement entouré d’un groupe de conseillers militaires. Le véritable but de l’organisation restait secret.

Luke avait à offrir ses connaissances tactiques et son expérience.

Il comprit vite qu’il détenait un trésor.

Pendant des années, il avait été le seul Maître Jedi de la galaxie. Il avait profité de sa solitude pour faire des recherches sur la période précédant l’arrivée au pouvoir de l’Empereur Palpatine.

Palpatine et son serviteur, Dark Vador, le père de Luke, avaient éliminé systématiquement les Jedi, puis cherché à effacer toute trace de leur existence.

Luke était parti en chasse du passé, sur la base de rumeurs, qui, pour la plupart, ne menaient nulle part. Car les Jedi semblaient s’être évanouis dans la nature avant d’être débusqués et exterminés par les forces de Palpatine.

En apprenant comment ils avaient survécu aux premières purges, effacé leurs identités, camouflé leurs pouvoirs, caché leurs armes et évité leurs poursuivants, Luke avait accumulé une excellente connaissance théorique des techniques de guérilla. Maintenant, il pouvait partager ce savoir avec les autres Initiés, il pouvait même le présenter dans un « manuel » de la résistance… Comme bien des années plus tôt, quand il avait fait renaître les réseaux de Jedi.

Mesurant combien il apportait à la cause, Luke commença enfin à se détendre lors des réunions.

Ces séances servaient aussi à lui faire oublier ses soucis personnels.

Plus de vingt-cinq ans plus tôt, après la mort de son oncle Owen et de sa tante Beru sur Tatooine, Luke s’était retrouvé seul, entouré de nouveaux amis, mais sans famille. Avec le temps, il s’en était créé une. Son père, hélas, n’en avait jamais fait partie : Anakin Skywalker était mort quelques mois après que Luke eut découvert sa véritable identité. Mais en Leia, il avait trouvé une sœur. Et son ami Yan Solo était ensuite devenu son beau-frère. Les neveux nés de cette union, Jacen, Jaina et Anakin Solo avaient agrandi le cercle familial. La relation de Luke avec Mara s’était lentement transformée : la haine meurtrière était devenue un amour partagé, qui avait culminé avec leur mariage. Puis Ben, leur fils, était né.

Huit personnes, les plus aimées que Luke eût au monde, appelaient Coruscant leur foyer…

Aujourd’hui, Coruscant était aux mains de l’ennemi. La famille de Luke, rassemblée au fil des années au prix de tant de sacrifices avait dû s’éparpiller.

Le petit Anakin Solo était mort consumant tous les espoirs que Luke avait investis en lui.

Jacen avait disparu, présumé mort lui aussi. Jaina était partie, cherchant la vengeance… Une quête qui conduisait souvent au Côté Obscur de la Force ou à la mort… voire aux deux.

Yan se remettait d’une blessure dans une base secrète Jedi et Leia restait à son chevet. Mara et Ben étaient les seuls que Luke pouvait serrer dans ses bras…

Devant la tristesse qui l’envahissait, Luke méditait, se concentrant sur son but, sur ses tâches et sur ceux qu’il aimait. Mais les techniques Jedi ne faisaient pas disparaître ses angoisses. Elles résistaient, tapies au fond de son inconscient, prêtes à ronger sa confiance.

Elles étaient les Yuuzhan Vong de son esprit.

 

Luke marchait dans une végétation luxuriante. Un moment ; il se crut en patrouille dans la jungle de Borleias. Non. L’air plus humide, la flore différente… Les arbres étaient plus sombres, plus hauts, leurs branches retombaient lourdement à terre.

Dagobah. Le monde où Yoda l’avait entraîné, il y a une éternité.

Un rêve ? Luke secoua la tête. Dans les rêves, il n’était pas aussi lucide. Il s’agissait d’une vision induite par la Force.

Se retournant, il découvrit l’ouverture d’une caverne. C’était là qu’il avait affronté l’image de Dark Vador… où, plus exactement, qu’il avait combattu sa propre image, vêtue de l’uniforme de Vador. Yoda n’était plus là. Constater que cette vision ne lui donnerait pas le plaisir de voir son vieux maître attrista Luke.

Il était vêtu de noir. Son sabre laser pendait à sa ceinture. Le décrochant, il le posa dans le creux d’une branche et pénétra dans la grotte.

A l’intérieur régnaient le silence et les ténèbres. Mais Luke savait qu’une entité était là, tout près, telle une obscurité plus profonde. Il ne pouvait ni la voir ni l’entendre, mais il la percevait. Il avança et la sentit se déplacer, tournant autour de lui.

Puis elle entra en contact avec lui… Sa haine se réveilla… Des relents de colère contre Dark Vador, contre l’Empereur et contre Luke lui-même, quand il s’était engagé trop loin sur le chemin du Côté Obscur…

La présence bougea et Luke la suivit.

Il émergea dans une vive lumière. Des gratte-ciel l’entouraient, si hauts qu’ils occultaient presque le ciel. Autour de lui, s’étendaient des ruines de permabéton, des speeders écrasés et des débris géants couverts d’algues vertes et d’herbe bleutée.

A ses pieds, gisait un corps humain enduit de la même matière.

L’obscurité se déplaçait devant lui, plus loin, entre les immeubles invisibles à l’œil nu, mais discernables à travers la Force.

L’entité roulait comme une tornade. Elle gonflait, se frottant contre les gratte-ciel. Les algues et l’herbe se transformaient à son contact, portant de gros fruits déformés, noirs et lisses comme de l’huile rance. Les fruits envahirent la ville et Luke les regarda tomber, frapper le sol, puis s’éparpiller dans toutes les directions…

Des fruits porteurs du désastre et du désir de destruction…

L’un d’eux poussa un hurlement strident. Il fut suivi par un second, puis un troisième. Bientôt, l’air vibra de cris.

Une main saisit l’épaule de Luke, qui ouvrit les yeux. Mara le secouait, livide. L’air résonnait de hurlements, mais c’était Ben que Mara écartait, comme pour le protéger de son père.

— Que se passe-t-il ? demanda-t-elle.

— Une vision, répondit Luke, tentant de reprendre le contrôle de ses émotions.

Les images flottaient autour de lui, véhiculant l’énergie maléfique du côté obscur. Ben, le fils de deux puissants Jedi, bénéficiait d’une sensibilité immense à la Force.

Il hurla de plus belle.

— Le mal rôde sur Coruscant, dit Luke. Un mal terrible, issu du Côté Obscur.

Occupation de Borleias, cinquième jour

L’hologramme montrait l’horizon familier de Coruscant. Les gratte-ciel, les nuages orange, à la fois si typiques et si banals qu’il était impossible de savoir à quelle région de la planète ils appartenaient.

Pourtant, le paysage avait quelque chose d’étrange. Les immeubles semblaient couverts d’une algue verdâtre. Sur le permabéton, au premier plan, les branches et les champignons se mêlaient aux algues. Au loin, leurs teintes se fondaient.

L’hologramme perturbait Luke à cause d’une ressemblance frappante avec sa vision…

Quelqu’un approcha de l’holoprojection, s’interposant entre le Jedi et l’image : un homme à la peau pâle, les nuances de vert de ses cheveux, de sa barbe et de sa moustache lui donnant un aspect non-humain. Il était mince sans être émacié. Habillé de noir, il évoquait une silhouette spectrale.

Malgré son aspect surprenant, l’homme avait une certaine célébrité. Wolam Tser était un historien politique dont les holodocumentaires avaient permis d’analyser toutes les étapes du développement de la Nouvelle République… De son origine, quand elle était encore l’Alliance Rebelle, sans organisation et sans argent, jusqu’aux glorieux jours de Coruscant.

— J’ai figé l’image afin que vous puissiez voir ce qui se passe à la surface, expliqua Wolam, avec son accent caractéristique. Une sorte de processus de terraformage… La végétation visible sur ces façades couvre aujourd’hui pratiquement toute la planète. Sa reproduction est incroyablement rapide. Le permabéton de ces immeubles était intact il y a moins de vingt-quatre heures… Le matériau vert clair est une sorte de lichen qui secrète des acides attaquant la composition chimique du béton. Les champignons, qui doivent être de la même famille que ceux de Yavin 4, explosent au contact. Ces plantes-ci s’enracinent profondément dans les surfaces et détruisent avec une rapidité meurtrière les structures de Coruscant. Or Coruscant, je ne vous l’apprends pas, est une immense construction artificielle… L’air devient chaque jour plus toxique et les derniers habitants se terrent dans les niveaux inférieurs, près des filtres atmosphériques.

— Et les intrusions yuuzhan vong ? demanda Luke.

Wolam regarda vers lui, tentant de percer l’obscurité.

— Ne serait-ce pas la voix de maître Skywalker ?

— C’est moi.

— Les Yuuzhan Vong lancent des raids dans les niveaux inférieurs. Certains ont des objectifs précis, comme la destruction des filtres. D’autres sont des expéditions de chasse. Mais le pire n’est pas là. Quand les Yuuzhan Vong évacuent une zone, ils se retirent à plusieurs kilomètres… Et voici ce qui se passe alors.

Prenant un petit appareil, Wolam appuya sur un bouton.

L’image figée se remit en mouvement. D’abord, rien ne changea : on voyait seulement le mouvement de la flore dans le vent…

Un éclair jaillit d’un nuage…

Le nuage étincela, projetant un point rouge suivi d’une traînée qui descendit vers la surface de la planète.

Le point disparut dans les gratte-ciel lointains. En silence, la traînée se dissipa lentement dans l’atmosphère.

La capacité d’enregistrement de l’appareil fut brièvement surchargée par une lumière vive avant que l’image revienne.

Derrière les immeubles encore debout, quelque chose poussait : une haute colonne de fumée, de la forme d’un champignon.

Une onde de choc fonça vers l’holocaméra et les bâtiments disparurent. La destruction immédiate toucha un parfait demi-cercle, faisant place nette. Luke entendit la salle retenir son souffle. L’onde se rapprochait sur l’écran et certains spectateurs reculèrent leur siège.

L’image de Coruscant trembla et disparut.

Quelqu’un ralluma la lumière et la vision d’apocalypse fut remplacée par la familiarité rassurante de la salle de réunion.

Wolam, à gauche de Wedge, était le seul debout.

— Ce plan a failli coûter la vie de mon opérateur, Tam, dit-il en désignant un jeune homme grand et carré, à l’étroit dans son siège. Il est resté inconscient deux jours après m’avoir rejoint et il lui a fallu une bonne semaine pour se débarrasser des effluves toxiques qu’il avait inhalés. Les effets n’ont pas encore tout à fait disparu.

— De quelle arme s’agit-il ? demanda Wedge.

Wolam sourit.

— D’une des nôtres. Une plate-forme Golan, qui défendait Coruscant, il y a encore quelques jours. Les Vong l’ont détruite, puis l’ont dégagée de son orbite pour qu’elle s’écrase sur la planète. Il est impossible… (Wolam hésita.) Le nombre de victimes dû au choc est incalculable. La zone d’impact se situait à deux cents kilomètres au sud-ouest du palais impérial. Les Vong « décrochent » les satellites les uns après les autres. Seuls quelques millions d’habitants ont réussi à s’enfuir de Coruscant. Les autres sont en danger de mort – à court terme à cause des chutes de satellites, à long terme à cause du remodelage de l’environnement.

— Merci pour ces informations, dit Wedge. Les images ont été transmises aux équipes spécialisées dans les techniques yuuzhan vong. (Il consulta son databloc.) Les dégâts de votre navette… Datent-ils d’après votre départ de Coruscant ?

— Il m’a fallu plusieurs jours pour organiser ma fuite, expliqua Wolam. Nous voulions partir en groupe. Leurs chasseurs allaient nous intercepter : en partant nombreux, certains survivraient alors qu’un vaisseau isolé n’aurait pas eu cette chance. (Il haussa les épaules.) J’ai survécu.

— Nos techniciens réparent votre vaisseau, qui sera prêt dans un jour ou deux. Vous pouvez partir avec le prochain convoi de réfugiés. Nos chasseurs vous couvriront.

Wolam regarda autour de lui. Luke le vit étudier un à un les participants. Puis le regard de l’homme s’arrêta sur Wedge.

— Je préférerais rester, si c’est possible. Je suis historien, et c’est ici que s’écrit l’histoire. Nous ne vous gênerons pas : nous dormirons dans nos quartiers, sur la navette.

— Très bien, dit Wedge. (Il se leva.) A présent, au travail. Navré de ces mauvaises nouvelles, messieurs, mais nous devons nous tenir au courant.

 

Tam mit longtemps à atteindre la porte : on se pressait pour le féliciter d’avoir rapporté des informations aussi précieuses, et d’avoir survécu. Le jeune homme acquiesça en silence, mal à l’aise au milieu de tant de célébrités.

Il tenta maladroitement de se rapprocher de la sortie, mais sa taille et sa musculature lui interdisaient la discrétion. Il trébucha contre un pied de chaise, bouscula quelques officiers, s’excusa, et se retrouva enfin près du but… Arrivé dans le couloir, il s’enfuit à grands pas.

Quelques minutes plus tard, Tam respirait enfin l’air moite et chaud de Borleias.

— Laissez-moi deviner. Vous détestez la foule ? demanda une jeune femme.

Tam la regarda… et son estomac se serra.

Son interlocutrice avait raison, il détestait la foule, mais les jolies femmes ne le mettaient pas plus à l’aise. En leur présence, il avait du mal à parler et son cœur battait à tout rompre.

Celle-ci était mince, ses cheveux blonds et bouclés tirés en arrière. Ses yeux d’un bleu intense et son visage pouvaient illuminer toute une pièce.

Tam prit un moment pour se rappeler ce qu’elle venait de dire. Puis il esquissa un sourire.

— C’est sûr. Je suis un opérateur de terrain. J’ignore comment Wolam a réussi à me convaincre de retourner sur Coruscant…

— Il doit être persuasif.

— Il l’est.

Le jeune homme tenta de se remémorer comment les gens normaux agissaient en de telles circonstances, puis il tendit la main.

— Tam Elgrin.

— Danni Quee.

— Hé, je connais votre nom. Vous êtes presque célèbre ! (Il fit une grimace.) Ce n’est pas ce que je voulais dire.

Le sourire de la femme montra qu’elle était plus amusée qu’offensée.

— Tam, j’ai une question. Avez-vous d’autres enregistrements ? Que Wolam ne nous aurait pas montrés ? Des enregistrements yuuzhan vong ?

— Je…

Un début de migraine martela les tempes de Tam, mais il l’ignora. Les ordres lui interdisaient de montrer les enregistrements. Wolam Tser lui en voudrait peut-être…

Ou pas. Après tout, c’était la guerre. Il comprendrait que les informations vitales se partageaient…

— J’ai quelques images de l’attaque d’un groupe de Yuuzhan Vong. J’étais avec des réfugiés dans les niveaux médians de Coruscant. Après avoir filmé, j’ai commencé à courir… Les Vong ont tué mes compagnons et j’ai réussi à m’échapper.

Il leva son sac, qui contenait son holocaméra, son holocaméra de secours, ses enregistrements et ses supports informatiques vierges. Ayant trouvé ce qu’il cherchait, il lui tendit la datacarte.

— Voilà, c’est ça. Mais j’aimerais que vous me la rendiez.

— Je la copie et je vous la rapporte aussitôt. Dans la journée.

— Merci.

— Je suis enchantée de vous avoir rencontré, Tam, dit Danni avec un sourire avant de s’éloigner.

— Moi de même, souffla Tam.

Maîtrisant son rythme cardiaque, il se dirigea vers la zone de sécurité.

La jungle carbonisée était couverte de vaisseaux et de véhicules. A côté de deux docks en construction, on montait des parois métalliques préfabriquées. Des navettes, des chasseurs, des speeders, des hovercrafts et des transporteurs attendaient tout autour, ainsi qu’un gros cargo très endommagé.

Sortant son holocaméra, Tam prit quelques instants pour filmer ce qui l’entourait. Un jour, si la Nouvelle République survivait, les gens voudraient voir ces images…

La migraine augmenta si soudainement qu’il crut avoir été poignardé. Etouffant un cri, Tam se prit la tête entre les mains et essaya de ne pas tomber.

Il connaissait la raison de la douleur : sa désobéissance. Il avait pourtant reçu des instructions claires.

Il reposa l’holocaméra dans son sac, puis rejoignit la navette de Wolam.

A l’origine, ce n’était pas une navette, mais un vaisseau impérial lourdement armé conçu pour quatre personnes. Des années auparavant, Wolam Tser l’avait volé pour s’enfuir avec des enregistrements sur la construction des bases impériales. Il avait ensuite commencé à le modifier. Les tubes des torpilles à protons et des missiles avaient été retirés. La tourelle laser supérieure, remplacée par un dôme en transpacier, augmentait l’espace disponible et offrait une vue imprenable sur les étoiles. Les commandes simplifiées permettaient le pilotage par deux personnes au lieu de quatre.

Les soutes à missiles avaient été converties en deux minuscules cabines, une pour Wolam et l’autre pour son opérateur.

Avec un sourire contrit, Tam remercia les mécaniciens d’un signe de la tête. Ils soudaient des plaques métalliques sur les trous des ailes pour réparer les dégâts causés par un vaisseau de réfugiés qui avait explosé tout près du leur.

Accélérant le pas, Tam monta dans la navette. Le seul moyen pour arrêter la migraine était de se dépêcher.

Dépassant le poste de pilotage, il entra dans la coursive.

En deux pas, il fut à la porte de sa cabine. Il y entra en courant et verrouilla la porte.

Soulevant le matelas de sa couchette, il dégagea le compartiment de rangement. A l’intérieur se trouvait un rocher presque sphérique.

— Un souvenir de Corellia, avait-il dit à Wolam.

Bien sûr, il mentait.

Il le fallait.

Tam posa la pierre sur sa couchette et gratta trois fois sa surface. Puis deux fois encore.

Sa surface s’écarta le long d’une jointure invisible, s’ouvrit comme un coquillage, et révéla une masse organique ronde.

A l’idée de la toucher de nouveau, l’estomac de Tam se souleva. Tendant la main, il chercha, trouva la protubérance et appuya, sentant la chose vivante réagir à son contact. Il s’essuya les doigts sur son pantalon. Il n’y avait pourtant aucun résidu sur ses doigts.

Quelques instants plus tard, la masse de chair commença à bouger et prit la forme approximative d’une tête humaine. Ce n’était pas une femelle yuuzhan vong : le front était trop prononcé et Tam ne voyait aucune trace de mutilation.

Le villip le regarda avec le visage de son contrôleur.

— Rapport, dit la créature d’une voix sans accent.

Tam sentit sa migraine disparaître. Mais le tourbillon de ses émotions l’empêcha d’apprécier son soulagement.

— Nous sommes sur Borleias…, commença-t-il.

Occupation de Borleias, sixième jour, peu avant l’aube

On frappa à la porte. Wedge se redressa en sursaut et ouvrit les yeux, l’esprit embrumé.

Assis à son bureau, dans son fauteuil, il s’était endormi. Une fois de plus.

Il ne pouvait pas se permettre cette faiblesse. S’il ne donnait pas le meilleur de lui-même en permanence, d’autres mourraient.

Se frottant les yeux, il se tourna vers la porte.

— Entrez.

La porte glissa. D’abord, Wedge ne vit personne. Enfin, il aperçut son visiteur, qui jeta un regard prudent dans le bureau.

L’homme était de taille moyenne. Le crâne rasé, sa moustache et sa barbe taillées court lui donnant un air sinistre que son sourire chaleureux contredisait. Son charisme le classait dans la catégorie des célébrités, des hommes d’affaires à succès ou des grands criminels…

Wedge se leva.

— Face ! J’avais peur que tu te sois perdu sur Coruscant. Entre.

Garik « Face » Loran, chef du groupe de renseignements connu sous le nom de « Spectres » secoua la tête.

— Plus tard. Je viens seulement livrer un colis.

— Quel colis…

Une silhouette passa derrière Face, et se précipita dans le bureau : une femme grande, presque autant que Wedge, mince, les cheveux blonds striés de gris. Dans sa jeunesse, elle avait été d’une beauté extraordinaire. Aujourd’hui, les rides creusées par les rires et les larmes la faisaient paraître encore plus belle aux yeux de Wedge.

D’un bond, il contourna le bureau pour la serrer dans ses bras.

— Iella…

D’autres voix se joignirent à la sienne.

— Papa !

Wedge lâcha sa femme, s’accroupit et étreignit ses filles, apparues comme par magie. Il se releva avec Syal et Myri dans ses bras.

Quelques jours auparavant, quand il les avait portées ainsi toutes les deux, sur Coruscant, il s’était plaint de leurs poids. Elles avaient tellement grandi ! Mais aujourd’hui, elles semblaient si légères…

Un instant plus tôt, sa vie n’était rien de plus que sa mission. Maintenant, l’avenir existait de nouveau – un futur qu’il pouvait serrer contre lui.

Wedge releva les yeux, cherchant Face, mais le chef des Spectres avait disparu et la porte se refermait déjà.

 

Ils étaient allongés dans l’obscurité des quartiers de Wedge. A travers le transpacier turquoise, la lumière de la lune colorait tout en bleu : le lit, les murs, la peau.

— Ce n’est pas comme voir sa planète détruite, souffla Iella. Pas comme s’ils avaient attaqué Corellia. Mais regarder les plates-formes orbitales fondre sur la ville… savoir que des millions de personnes mourraient à chaque impact… que ceux qui abandonnaient tout derrière eux avaient « de la chance »… Coruscant se meurt. Wedge, je ne sais pas si je suis capable de décrire une telle horreur.

— Inutile, dit-il. Je ne sais pas si je peux décrire ce que j’ai ressenti en t’abandonnant. L’horreur d’avoir à me dire : « Je ne peux pas les trouver. Je ne peux pas les aider. Je dois aider les autres, ceux qui sont vivants… »

Iella sourit.

— Tu n’avais pas confiance en mes capacités ?

— Si. Mais la confiance n’empêche pas l’inquiétude.

Iella l’embrassa et posa sa tête sur son épaule.

— Et maintenant ? Que faisons-nous ?

— Eh bien… Tu viens d’être nommée à la tête des renseignements, ce qui libère Mara. Elle pourra utiliser son talent inimitable à pourrir la vie des Vong. Je vais avoir besoin de toi… Tu devras diffuser des informations parmi nos hommes et surveiller les réactions des Yuuzhan Vong ; si nous avons des traîtres parmi nous, je veux les identifier au plus vite pour les utiliser ou les éliminer.

— Ici ou à un autre poste ?

— Ici.

Puis il lui parla de l’intervention du Conseil.

Iella garda le silence un long moment, réfléchissant.

— Wedge, tu détestes combattre sur deux fronts. Les Vong d’un côté, le Conseil de l’autre.

— Le Conseil ignore que nous les combattons.

— Ces gens savent qu’ils nous font la guerre, ils ignorent seulement que nous sommes au courant. Ils risquent de s’en apercevoir plus vite que prévu. Même sans Borsk pour les diriger, ils ont de la ressource. Les espions yuuzhan vong ne sont pas les seuls dont il faut se méfier. Mon autre mission sera donc de diffuser des informations pour surveiller les réactions de nos « alliés »… afin de les utiliser ou de les éliminer.

— Je savais que je te gardais pour une bonne raison.

— J’en connais une autre.

— Ne me chatouille pas…

Derrière les lignes ennemies 1 - Le rêve rebelle
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